La magie d’hier, n’est de toute évidence pas la magie d’aujourd’hui, et s’il est facile de nos jours de faire la distinction entre un Shin Lim et un Harry Potter, entre la magie de spectacle (voire de technique) et la magie surnaturelle (que l’on y croit ou pas d’ailleurs, cela vous appartient !), cela n’a pas toujours été le cas. Laissez nous vous présentez l’histoire de la magie.
On ne va évidemment pas vous faire un cours magistral sur “Naissance et évolution des pratiques et croyances magiques et ésotériques en milieux rural et urbain du IIème siècle à nos jours”. On pourrait ! Bien sûr ! Mais bon, on ne le fera pas. Pour des raisons… ésotériques.
Ce que l’on va faire en revanche c’est vous faire goûter les grands moments et mouvements de cette évolution, comme un teaser. Et si à la fin vous avez tout de même envie de lire la thèse “Naissance et évolution des pratiques et croyances magiques et ésotériques en milieux rural et urbain du IIème siècle à nos jours”, on verra ce que l’on peut faire.
L’imbroglio
L’histoire de la magie n’est pas un long fleuve tranquille. Longue, elle l’est, certains la font même remonter jusqu’aux prémices de l’humanité. Tranquille, beaucoup moins. Avançant dans l’ombre des religions, parfois main dans la main, mais souvent en guerre. Les occurrences de la magie dans l’histoire, nous montrent une pratique tantôt vénérée tantôt haïe et condamnée, selon le lieu, l’époque, ou les deux. Un jour l’apanage grandiose et stratégique des grands, des rois et reines, un autre celui dangereux et hérétique des païens et des marginaux.
La confusion n’est que renforcée par la grande variété des termes utilisés et inventés au gré des intérêts et stratégies de chacun. Des “mages”, des “sages” et des “guérisseurs” contre des “chamanes”, des “sorciers”, et des “astrologues”. Les premiers sont des conseillers de palais, des enchanteurs, les autres des païens, des hérétiques. On tolère les prophéties et prédictions d’un Nostradamus au XVIème siècle, mais le démon et la corde ne sont jamais très loin. La magie répond à un besoin de croire dans un monde où la plupart des choses restent inexpliquées.
Vous l’aurez compris, en termes de magie, les limites sont floues. Spectacle, utilité, manifestation surnaturelle ou seulement extra-sensorielle, la nature de la magie dépend aussi et surtout de qui y assiste et de ses croyances. C’est de là que règne la grande ambiguïté persistante. Pour certains il s’agit de superstitions inoffensives, pour d’autres d’intervention divine, ou encore de pouvoirs naturels, ou bien d’arnaque pure et simple, là où certaines personnes voient l’intervention de forces plus sombres, malines…
Des croyances à l’Illusion
Avant ses premières formes de reconnaissance artistique, la magie est donc essentiellement liée au naturel et au surnaturel et très peu associée au divertissement, pourtant les deux ont cohabité tout du long. La performance magique existe déjà bel et bien dès l’Antiquité, des traces de “tours de magie”, et notamment le fameux tour du Gobelet, ont été retrouvées en Egypte ancienne (2700 av. J.C.), Grèce antique (1300-650 av. J.C.), puis à Rome (50-300 ap. J.C.), et ainsi de suite pour perdurer jusqu’à aujourd’hui.
Simultanément des lois et édits interdisent la magie quand elle menace. La répression est constante jusqu’au XIIIème siècle, la peine de mort est souvent de rigueur, même si quelques distinctions de genre se font entendre. On distingue un sorceleur d’un autre, on évalue, on juge, on punit, on estime la valeur des uns et des autres selon les besoins et les alliances.
La chasse aux sorcières prend aussi racine à cette époque, pour atteindre son pic aux XVème et XVIème siècles. Il ne fait alors pas bon pratiquer la magie, quelle qu’elle soit.
Les persécutions déclinent à partir du XVIIème siècle, les croyances changent. En 1682, par exemple, en France, Louis XIV abolit les notions de sorcier et magicien, et les remplacent par celles de charlatans, d’imposteurs et de fous. Vient ensuite le siècle des Lumières qui valorise la raison, et on admire les formes contrôlées de magie, telle la prestidigitation.
La magie “moderne”
Le XIXème siècle marque un tournant exceptionnel dans l’histoire de la magie. Jean-Robert Houdin (1801-1871) donne ses lettres de “noblesse” à la magie. De spectacles de rue ou de cirque à performances privées et payantes prisées, la magie se modernise et prend sa place comme art de l’illusion. Simultanément à son ascension sur la scène, la magie prends des tours en s’associant à la science pour repousser les limites du possible.
La relève est assurée par Houdini (1874-1926). Après s’être vainement essayé aux tours de cartes, il devient un phénomène grâce à ses dangereux prodiges et profite même de l’essor du cinéma pour faire sa place. Il impose plus profondément encore la notion de performance comme quête de l’impossible.
La période qui suit est marquée par les avancées technologiques ainsi que l’avènement d’une culture du divertissement, dans les pays occidentaux principalement. Traités, films, programme télévisuels et enfin vidéos en ligne, la magie toujours plus créative se réinvente avec les moyens à disposition. Elle augmente ainsi son audience et sa côte de popularité de façon exponentielle. Mais le spectacle vivant ne s’éteint pas pour autant, au contraire. Close-up, Sleight of hand, Street magic, les tours de cartes (découvrez des tours comme Oracle sur notre site) et autres illusions de proximité foisonnent et les écrans servent à les promouvoir. Associations, business et événements, la magie est un art, une discipline, une industrie et elle est là pour durer.
C’est un art, reconnu, plus ou moins… La magie est une forme d’art un peu bâtarde, qui ne fait pas très noble. Mais dans une société qui valorise le divertissement plus encore… la magie a la cote et surtout est enfin valorisée. On passe donc de saltimbanque, à… saltimbanque stylé.e !

Manon Bernard
Rédactrice Web